RECIT N° 16

Publié le par maybruce

 LA DERNIERE FEMME

.« Excuse moi, je te parle trop de ma vie, mais quand nous nous rencontrons vraiment Riberio et moi c’est extraordinaire enfin toi tu n’as rien, je ne sais pas pourquoi je me plains. » 

« Pour me sortir de ma torpeur et aussi parce que tu ne sais rien garder pour toi et aussi parce que tu es une amie. »

« Oui c’est mille fois vrai, toi aussi tu es un ami et je suis triste que tu partes surtout  pour te faire moine, j’espère que tu feras des rencontres durant la traversée, mais pourquoi ne restes-tu pas au Nouveau Mexique. »

Il ne répondit pas

Le lendemain le soleil commençait à sortir de ses braises comme un oeuf d’or du feu d’un alchimiste, Riberio était recherché par l’armée pour avoir aidé quelques indiens persécutés, de plus en raison de ses dons de guérisseur les médecins commençaient sérieusement à le jalouser. Il avait coupé sa barbe et avait troqué sa veste à franges en daim pour un beau costume trois pièces, il était munis de faux papiers, Juanita avait emmenée une belle robe bleue outremer qu’elle comptait mettre dès qu’ils troqueraient  les chevaux pour la diligence. Emmanuel avait amené un haut de forme à la mode française, il se nommait Henri Lenormand voyageant avec sa femme et son frère. Pour se cacher efficacement il avait décidé de ne pas se cacher, car disait-il « Les choses évidentes sont parfois les plus invisibles. »

Riberio contemplait les affiches où il apparaissait barbu, le regard halluciné, dessin effectué par un journaliste qui l’avait vu soigner.

« Dites donc dix mille dollars, ce n’est pas si mal comme récompense. »

Ils empruntèrent la diligence, laissèrent les chevaux et prirent même une petite ligne de chemin de fer. Ils avaient changé d’état, après le Nouveau Mexique ils traversèrent l’Arkansas et le Tennessee. Les affiches avaient disparues depuis longtemps mais ils gardèrent quand même leurs fausses identités. Juanita revivait, Riberio était de nouveau aux petits soins pour elle. Il avait abandonné sa mission de thérapeute et de guide, l’adversaire restait dans l’ombre. Ils descendirent le Mississippi dans un bateau à aubes, durant cette descente Emmanuel fit la connaissance d’une jeune femme Clara Wilson dont la mère était française. Clara était une petite brune très volubile et qui riait beaucoup. Elle prenait plaisir dans la compagnie d’Emmanuel qui lui restait morose. Clara trouvait Emmanuel à son goût, et elle devenait de plus en plus pressante.   

« Voyons Emmanuel entourez moi de vos bras, il fait froid sur ce pont. »

« Mais nous sommes en plein été. »

« Aimez vous les femmes, faites vous semblant de ne pas comprendre. »

« Il faut que je vous confie un secret, ou plusieurs secrets, mais je ne sais pas si vous voudrez encore me voir après cela. »

Il s’assit prévoyant un long temps de confidences, sans plus de manière elle s’assit sur ses genoux en prétextant pour la forme que les chaises en bois étaient trop dures. »

Il raconta son aventure le plus exactement possible, mais en ne mentionnant pas certains détails, comme par exemple la sorcellerie de Riberio. »

« Mais passons au plus important, je suis prêtre et j’ai eu deux femmes j’espère que vous pourrez me regarder en face?..... »

Elle resta sur ses genoux contrairement à son attente et de plus elle souriait.

« Oh, non bien au contraire je ne suis pas choquée, un vieux dicton français affirme jamais deux sans trois, et puisque nous en sommes aux confidences, j’en ai deux à vous faire, je suis protestante par mon père et juive par ma mère, j’espère que cela ne vous dérange pas trop de fréquenter un femme qui a deux religions et de plus différente de la votre, de plus j’apprécie votre confiance, l’idée d’un prêtre fricotant avec deux femmes me réjouit plus qu’il me choque, vous voyez vous n’êtes pas trop mal tombé. » 

« Mais il y a plus grave, je suis décidé à me retirer du monde, j’aspire à devenir moine. »

« Je suis disponible pour vous, et je comprends vos hésitations, décidons si vous le voulez bien que vous m’apporterez votre réponse avant la fin de la traversée vers la France et je me sentirais dégagée de mes obligations après la moitié du voyage, voulez vous essayer de faire une nouvelle vie. »

Elle se leva l’embrassant légèrement sur les lèvres.

« Mais bien sûr, vous pouvez m’apporter votre réponse plus tôt. »

Ils arrivèrent à la Nouvelle Orléans, la ville était déjà importante, ils rencontrèrent des personnes d’origine française et se mirent en quête d’une embarcation pour la traversée, en discutant en fréquentant les bars, ils trouvèrent un petit bateau à voile un Steamer qui faisait voile vers Bordeaux quelques jours plus tard.

C'était le moment des adieux, le bateau porté par un bon vent s’éloigna du quai «  Ecrit nous Emmanuel disait Juanita de toute façon Riberio viendra vous rendre visite de la manière que tu sais. »

Emmanuel se demandait si Clara apprécierait «  la façon que tu sais. »

Le bateau rapide fila rapidement dans les flots Riberio dit.

« Vite retournons au Mexique, j’ai comme l’intuition que notre présence est très souhaitée à l’hacienda. »

« Oui mon amour en route. » Elle jeta ses chaussures à haut talons dans la mer, disant qu’elles faisaient mal aux pieds et qu’elle ne pouvait pas marcher, la robe bleue trop longue subit le même sort et elle enfila une robe à fleurs qui s’arrêtait à mi-mollet, elle sauta d’un mouvement sur l’un des chevaux qu’ils venaient d’acheter.

« Je me sens mieux. »

Elle partit au triple galop.

Le steamer voguait sur les vagues de l’océan Atlantique, le soleil brillait, le voyageur se poursuivait lentement par manque de vent. La mi-parcours approchait et la date fatidique de l’ultimatum approchait. Emmanuel était de plus en plus sombre, il répondait à peine aux bonjours enjoués de Clara, celle-ci cependant ne se découragea pas.

« Emmanuel venez me voir ce soir, vers neuf heures après le repas, j’ai commandé du champagne. »

« Il fît oui de la tête décidé à dire non aux propositions de Clara.

Le soir vers neuf heure moins le quart, il frappa à la porte. Clara sourit, il est en avance c’est généralement un présage plutôt favorable, pensa-t-elle?. Emmanuel se courba pour entrer dans la petite cabine et regarda Clara seulement vêtue d’une petite chemise de nuit brodée. 

« Oh! Excusez-moi, je ne savais pas que vous n’étiez pas prête. »

« Si je suis prête et depuis longtemps, asseyez-vous, tenez prenez une coupe de champagne. »

Elle sourit et s’assit en face de lui, elle posa délicatement ses petits pieds nus sur les genoux d’Emmanuel. Il remarqua qu’elle avait presque les mêmes jambes que Martine et il en fût tout excité.

« Emmanuel, j’ai honte de vous faire du chantage vous me donnerez votre réponse une fois que nous serons arrivés en France et quoi qu’il arrive ce soir demain est un autre jour et ne vous laissez pas influencer, j’ai seulement une envie folle de passer un moment heureux avec vous.

S'il ne regardait pas le visage, ces jambes ressemblaient beaucoup à celles de Martine, il ferma les yeux et laissa ses mains agir, il laissa ses mains dévêtir le corps de Clara, sa peau était douce, elle succomba très rapidement, elle retint de justesse un « oui, oui. » Comme si elle avait deviné qu’il tenait quelqu’un d’autre dans ses bras. Il fît l’amour longuement comme si c’était la dernière fois de cette vie et c’était la dernière fois.

Il avait constamment devant l’écran de ses yeux l’image de la petite Annamite qui semblait si heureuse. Quelques heures plus tard il se réveilla

« Non Emmanuel, ne me dit pas ta réponse maintenant prenons simplement du bon temps. »

« Je vais retourner à ma cabine, je te vois demain. »

« Mais ce n’est pas prudent, regarde les vagues. »

En effet, la cabine d’Emmanuel à plus de dix mètres de celle de Clara était située sur le pont où grondait la tempête, les flaques d’eau entraient par la porte de Clara. Des vagues d’eau s’abattaient sur le pont le Steamer était secoué comme une coquille de noix.

« Ne te fais pas de soucis j’ai le pied marin. »

 « Reste je te prie, c’est trop dangereux. »

Il aurait dû rester. A peine fut-il sorti qu’une vague énorme l’emporta et il passa par dessus le bastingage. Il se retint de justesse au dernier barreau. Clara avec une surprenante rapidité lança une corde qu’elle attacha au mât.

« Si tu veux vivre prends la corde. »

Et si tu veux vivre, il manqua la corde à cinquante centimètres de lui et il coula à pic. Il n’avait plus le goût de vivre sans Martine. Il mourut très vite en moins de trois minutes passé la panique intense de la noyade, il fût projeté dans les airs, il vit le bateau malmené par la tempête furieuse, il sut instantanément qu’il venait de faire un enfant, une fille qu’il croisa dans son chemin vers l’au-delà . Il revit les images de sa vie dans une abondance d’images extraordinaires, puis ce fût le calme et il traversa un monde très noir et très triste, mais au bout du monde auréolé d’une lumière intense il retrouva Martine. Elle n’ouvrait pas les lèvres, mais ils communiquaient par la pensée.

 

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